lundi 29 septembre 2025
lundi 22 septembre 2025
"𝑼𝒏𝒆 𝒉𝒆́𝒓𝒐𝒊̈𝒏𝒆 𝒓𝒖𝒔𝒔𝒆… 𝑫𝒆𝒔𝒕𝒊𝒏 𝒕𝒓𝒂𝒈𝒊𝒒𝒖𝒆, 𝒓𝒐𝒎𝒂𝒏𝒆𝒔𝒒𝒖𝒆", 𝐹𝑒𝑚𝑚𝑒 𝐴𝑐𝑡𝑢𝑒𝑙𝑙𝑒, sept. 2025
"𝙄𝙧𝙞𝙣𝙖, 𝙪𝙣 𝙤𝙥𝙚́𝙧𝙖 𝙧𝙪𝙨𝙨𝙚", d’Anouar Benmalek
dimanche 21 septembre 2025
"J’ai tant de choses à te dire, Ou plutôt, une seule, mais vaste comme la mer, Comme la mer, profonde et infinie…"
"𝙐𝙣𝙚 𝙜𝙧𝙖𝙣𝙙𝙚 𝙚𝙩 𝙡𝙤𝙣𝙜𝙪𝙚 𝙝𝙞𝙨𝙩𝙤𝙞𝙧𝙚 𝙙'𝙖𝙢𝙤𝙪𝙧..."
Ps: La librairie Antipodes (8 rue Robert Schuman, Enghien-les-Bains) m'a fait l'honneur de m'inviter à une rencontre avec les lecteurs autour de « Irina, un opéra russe », ce samedi 20 septembre 2025 à 17h. Je serais heureux de vous y retrouver.
A. Benmalek
𝑽𝑳𝑬𝑬𝑳 399 𝑹𝒆𝒏𝒄𝒐𝒏𝒕𝒓𝒆 𝒍𝒊𝒕𝒕𝒆́𝒓𝒂𝒊𝒓𝒆 𝒂𝒗𝒆𝒄 𝑨𝒏𝒐𝒖𝒂𝒓 𝑩𝒆𝒏𝒎𝒂𝒍𝒆𝒌 𝒂𝒖𝒕𝒐𝒖𝒓 𝒅𝒆 𝒔𝒐𝒏 𝒓𝒐𝒎𝒂𝒏 "𝑰𝒓𝒊𝒏𝒂, 𝒖𝒏 𝒐𝒑𝒆́𝒓𝒂 𝒓𝒖𝒔𝒔𝒆" 𝒂𝒖𝒙 𝑬́𝒅𝒊𝒕𝒊𝒐𝒏𝒔 𝑬𝒎𝒎𝒂𝒏𝒖𝒆𝒍𝒍𝒆 𝑪𝒐𝒍𝒍𝒂𝒔
jeudi 18 septembre 2025
"𝑨𝒏𝒐𝒖𝒂𝒓 𝑩𝒆𝒏𝒎𝒂𝒍𝒆𝒌, 𝒖𝒏 𝒎𝒆𝒓𝒗𝒆𝒊𝒍𝒍𝒆𝒖𝒙 𝒓𝒐𝒎𝒂𝒏𝒄𝒊𝒆𝒓 𝒒𝒖'𝒐𝒏 𝒏𝒆 𝒔𝒆 𝒍𝒂𝒔𝒔𝒆 𝒑𝒂𝒔 𝒅𝒆 𝒍𝒊𝒓𝒆, 𝒆𝒏𝒄𝒐𝒓𝒆 𝒆𝒕 𝒕𝒐𝒖𝒋𝒐𝒖𝒓𝒔." (Kɪᴍᴀ Mᴏʀɪ, Aʀᴛs ᴇᴛ Lᴇᴛᴛʀᴇs ᴅᴜ ᴍᴏɴᴅᴇ, sᴇᴘᴛ. 2025)
Irina, un opéra russe d’Anouar Benmalek
mercredi 10 septembre 2025
𝙄𝒓𝙞𝒏𝙖, 𝒖𝙣 𝙤𝒑𝙚́𝒓𝙖 𝙧𝒖𝙨𝒔𝙚 : "Un roman vaste, intense, qui s’écoute autant qu’il se lit ".
𝓜𝓪𝓻𝓮 𝓝𝓸𝓼𝓽𝓻𝓾𝓶 - 𝓤𝓷𝓮 𝓶𝓮́𝓭𝓲𝓽𝓮𝓻𝓻𝓪𝓷𝓮́𝓮 𝓪𝓾𝓽𝓻𝓮𝓶𝓮𝓷𝓽 (2 sept. 2025)
𝐏𝐨𝐥𝐨𝐧𝐚𝐢𝐬𝐞 𝐝𝐞𝐬 𝐧𝐞𝐢𝐠𝐞𝐬, 𝐭𝐚𝐧𝐠𝐨 𝐝𝐞 𝐥𝐚 𝐧𝐨𝐬𝐭𝐚𝐥𝐠𝐢𝐞, 𝐦𝐚𝐫𝐜𝐡𝐞 𝐟𝐮𝐧𝐞̀𝐛𝐫𝐞 𝐝𝐞 𝐥’𝐇𝐢𝐬𝐭𝐨𝐢𝐫𝐞 : "𝙄𝒓𝙞𝒏𝙖, 𝒖𝙣 𝙤𝒑𝙚́𝒓𝙖 𝙧𝒖𝙨𝒔𝙚" 𝐞𝐬𝐭 𝐭𝐨𝐮𝐭 𝐜𝐞𝐥𝐚 𝐚̀ 𝐥𝐚 𝐟𝐨𝐢𝐬.
𝑨𝒏𝒐𝒖𝒂𝒓 𝑩𝒆𝒏𝒎𝒂𝒍𝒆𝒌 nous prend par la main au milieu d’une file de l’Ermitage, devant un Caravage qui cligne d’un œil invisible, et ne nous lâche plus. Irina, soprano ardente, veut tout : la note absolue, l’ivresse des rappels, l’éternité de la voix. Walid, historien venu d’Algérie, veut l’amour, la Russie et un sens au chaos – il croit trouver une clé dans une salle bleue, entre un luth et des fruits. Et Vladimir, grand-père au passé de pierre, veut un pardon que l’Histoire n’octroie pas. La grande force du livre tient dans ce contrepoint : à la ferveur des répétitions répond l’aveu d’un ex-tchékiste, aux rougeurs des coulisses la nuit kazakhe des années 1930, à l’élan des corps la lourdeur des quotas et des archives. Benmalek compose un « opéra » en prose où chaque air est un dilemme, où toute beauté réclame son tribut. On y lit, haletant, la façon dont un siècle dévore les vies intimes – et comment la musique, parfois, impose à l’horreur la pudeur d’un vibrato. Un roman vaste, intense, qui s’écoute autant qu’il se lit.
vendredi 5 septembre 2025
𝙄𝒓𝙞𝒏𝙖, 𝒖𝙣 𝙤𝒑𝙚́𝒓𝙖 𝙧𝒖𝙨𝒔𝙚, d’Anouar Benmalek: 𝐓𝐞́𝐥𝐞́𝐫𝐚𝐦𝐚 lui accorde la note 𝐥𝐚 𝐧𝐨𝐭𝐞 𝐓𝐓𝐓 (𝐓𝐫𝐞̀𝐬 𝐁𝐢𝐞𝐧)
3 septembre 2025, Gilles Heuré
Irina, un opéra russe
Anouar Benmalek
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𝐓𝐓𝐓Lorsqu'en 1978 une jeune femme fantasque s'agrippe à lui pour griller la politesse aux nombreuses personnes qui font la queue devant le musée de l'Ermitage, à Leningrad, Walid, jeune étudiant algérien, ne se rend pas compte tout de suite que l'amour vient de lui tomber dessus. Non pas une simple promesse de liaison, mais une passion qui lui fera dire qu'il est prêt à mourir pour elle. Irina est une jeune soprano promise à un bel avenir à l'opéra, alors que lui prépare une thèse sur Napoléon en Égypte. Ce roman d'Anouar Benmalek, mathématicien dans une université parisienne, qui a longtemps vécu en URSS, est le récit d'une fusion amoureuse qui s'étire sur plusieurs décennies. Irina verra sa vocation contrariée par les turbulences politiques de l'URSS ; et Walid poursuivra une carrière d'historien, elle aussi perturbée par les violences politiques en Algérie. Les amants seront séparés longtemps, mais la volonté de retrouver Irina ne faiblira pas chez Walid — même lorsqu'un policier algérien lui dira, tout en le tabassant : « L'espérance est la mère des imbéciles… »
D'autres protagonistes, aussi denses les uns que les autres, accompagnent cette histoire : Vladimir, le grand-père d'Irina, jeune agent du NKVD dans les années 1930, confronté à l'épouvantable famine au Kazakhstan après avoir été prisonnier en France pendant la Première Guerre mondiale ; Tamara, l'amie fidèle et mystérieuse des deux amants ; Sacha, le compagnon de Walid qui s'accommode de la vie en URSS grâce à une bonne dose de cynisme. Avec eux aussi, dans ce grand pays dont les habitants, toujours menacés par les purges soudaines et implacables, se disent « immensément fiers d'être russes, profondément malheureux de l'être », les grands auteurs, Pouchkine, Dostoïevski, Mandelstam, Tchekhov ou Akhmatova, témoins littéraires de la violence des sentiments qui fortifient ou broient les individus.
| Éd. Emmanuelle Collas, 482 p., 22,90 €.
mercredi 3 septembre 2025
Irina, un opéra russe ~A. Benmalek : "Tourbillon narratif assez vertigineux... Saluer la virtuosité de l’auteur..."

Irina, un opéra russe ~Anouar Benmalek… rentrée littéraire !
Voici encore un des titres, lus en mai et juin pour le prix des adhérents Fnac 2025. J’étais un peu inquiète, je l’avoue, de rentrer dans un tel pavé et d’éventuellement m’y ennuyer. Mais la couverture promettait un voyage en Russie et, dans les premières pages, c’est d’un bien joli duo dont nous faisons la connaissance.
Résumé
Irina et Walid forment un couple atypique. Nous sommes à Leningrad, à la fin des années 70. Lui est un étudiant algérien, féru d’histoire, elle est soprano. Ils se rencontrent devant le musée de l’Ermitage dans des circonstances amusantes et vont vivre une belle histoire d’amour. Mais Walid est contraint de quitter le pays et ne reviendra pas avant quarante années. En parallèle, nous suivons le parcours de Vladimir, le grand-père d’Irina, qui a participé à des exactions au Kazakhstan dans les années 1930. Tout cela serait bien factuel si le fantastique ne s’en mêlait pas. Quel est donc en effet ce chien qui apparaît à volonté sur le tableau du « Joueur de Luth » de Caravage ?
Mon avis
Le roman que je vous présente aujourd’hui souffre je trouve de quelques longueurs, surtout dans les parties qui concernent Vladimir, le grand-père. Nous quittons alors le joli couple pour un pan d’histoire sombre et violent. Pour autant, j’ai compris l’importance de ces moments un peu longs quand j’ai refermé ce livre avec émotion. En effet, lorsque tout finit par s’imbriquer ou s’envoler dans un tourbillon narratif assez vertigineux, on comprend le temps qu’il a fallu pour poser chaque élément. Tout fait alors sens et donne envie de saluer la virtuosité de l’auteur. Je n’ai donc pas regretté aller au bout de ce pavé de presque 500 pages qui laisse, après sa lecture, une belle empreinte. A lire sans faute si vous aimez l’histoire avec un grand H et que le fantastique se mêle à la réalité.
Editions Emmanuelle Collas – 22 août 2025
J’ai aimé ce livre, un peu, beaucoup… ![]()
Sélection Prix Fnac 2025
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https://leslecturesdantigone.wordpress.com/2025/08/22/irina-un-opera-russe-anouar-benmalek-rentree-litteraire/
mardi 2 septembre 2025
"𝐈𝐫𝐢𝐧𝐚, 𝐮𝐧 𝐨𝐩𝐞́𝐫𝐚 𝐫𝐮𝐬𝐬𝐞" : 𝒂𝒎𝒐𝒖𝒓, 𝒄𝒖𝒍𝒑𝒂𝒃𝒊𝒍𝒊𝒕𝒆́ 𝒆𝒕 𝑯𝒊𝒔𝒕𝒐𝒊𝒓𝒆 𝒆𝒏𝒕𝒓𝒆𝒎𝒆̂𝒍𝒆́𝒔. (Texte et Podcast)
"𝐈𝐫𝐢𝐧𝐚, 𝐮𝐧 𝐨𝐩𝐞́𝐫𝐚 𝐫𝐮𝐬𝐬𝐞" : 𝒂𝒎𝒐𝒖𝒓, 𝒄𝒖𝒍𝒑𝒂𝒃𝒊𝒍𝒊𝒕𝒆́ 𝒆𝒕 𝑯𝒊𝒔𝒕𝒐𝒊𝒓𝒆 𝒆𝒏𝒕𝒓𝒆𝒎𝒆̂𝒍𝒆́𝒔.
Découvrez notre Podcast
Dans la vaste partition des littératures qui auscultent les cicatrices du XXe siècle, Irina, un opéra russe d’Anouar Benmalek se déploie comme une œuvre d’une ambition et d’une architecture singulières. Il s’agit d’un opéra total où les destins individuels, pris dans les glaces de la Neva ou les steppes funestes du Kazakhstan, deviennent les airs tragiques d’une Histoire dont les chœurs anonymes et brutaux résonnent encore. Le livre orchestre une polyphonie magistrale où la quête amoureuse d’un historien algérien à la retraite, Walid, à la recherche de son amour de jeunesse, la soprano Irina Rostova, devient l’ouverture d’une dramaturgie vertigineuse. Cette quête exhume les passés ensevelis, ceux de la violence d’État et de la culpabilité intime, révélant comment la voix d’une artiste peut porter, à son insu, le poids d’un monde fracturé.
Leningrad, capitale des âmes et des fantômes
Le roman ancre sa narration dans deux temporalités que tout oppose et que tout relie secrètement. D’une part, le Leningrad des années 1970-1980, cité impériale figée dans la torpeur brejnévienne, où la splendeur de l’Ermitage et la ferveur artistique du Kirov coexistent avec la surveillance bureaucratique et la précarité du quotidien. C’est là que Walid, jeune doctorant venu d’Algérie, découvre l’amour et la complexité d’une société où chaque geste est scruté. D’autre part, le livre plonge dans les ténèbres des années 1930 au Kazakhstan, théâtre d’une collectivisation forcée et d’une famine orchestrée par le pouvoir stalinien. Anouar Benmalek restitue avec une précision documentaire la langue glaciale de l’administration de la terreur : celle des quotas d’arrestations et des catégories de suspects, où l’individu est dissous dans la statistique.
Soit tu remplis ton quota, soit tu te retrouves dans le quota.
Cette phrase, assénée par un supérieur du NKVD, résume à elle seule la logique déshumanisante qui broie les corps et les consciences, transformant les serviteurs de l’État en rouages d’une machine à anéantir. C’est dans ce creuset de violence que se forge le destin de Vladimir, grand-père d’Irina, dont le passé de tchékiste constitue le cœur secret et tragique du roman.
Une partition à plusieurs voix
La composition d’Irina, un opéra russe emprunte sa structure à l’art lyrique.
Le récit alterne les focalisations comme des airs solistes qui se répondent en contrepoint. La voix de Walid, en 2022, est celle de la mémoire et du regret, une longue élégie portée par quarante ans de silence. Celle d’Irina, dans ses jeunes années, est celle de l’ambition artistique, de la passion charnelle et d’une lutte constante pour que sa voix souveraine échappe aux contingences matérielles et politiques. Enfin, la narration plonge dans la conscience de Vladimir, archéologie d’une faute originelle qui contamine les générations. Cette polyphonie est scandée par des motifs récurrents qui agissent comme des leitmotive. La contemplation du Joueur de luth du Caravage à l’Ermitage devient une méditation sur le regard et la vérité latente, où l’apparition fantomatique d’un chiot dans la toile symbolise ce qui n’existe que pour ceux qui savent voir. Le cauchemar, loin d’être un simple ressort psychologique, devient le mécanisme par lequel le temps lui-même se fissure, ouvrant des brèches sur des passés alternatifs et des avenirs avortés. L’aria, enfin, est l’espace où la voix d’Irina atteint une forme de liberté absolue, un capital symbolique qu’elle tente de préserver face aux pesanteurs du monde.
La tyrannie du temps et la dette de l’Histoire
Au cœur du roman palpite une interrogation philosophique sur la nature du temps. Le temps chez Benmalek est une matière dense, élastique, parfois réversible. À travers le personnage de Vladimir et ses “retours” dans le passé, le roman explore l’idée d’une histoire qui n’est pas une flèche mais une boucle, où chaque tentative de corriger le destin aggrave la tragédie initiale, comme si l’entropie du malheur était une loi physique inéluctable. Cette conception tragique du temps fait écho à la figure de l’ange de l’Histoire de Walter Benjamin, qui voit le passé comme une accumulation de ruines dont il ne peut se détacher. La culpabilité de Vladimir devient ainsi une dette qui se transmet, contaminant jusqu’à la vocation de sa petite-fille. La voix d’Irina, pure et transcendante, est aussi l’héritière inconsciente d’un silence criminel. L’art, dans cette perspective, est à la fois une rédemption possible et le lieu où se rejoue le drame. Cette dialectique trouve son apogée dans l’épisode du « double » de Staline, scène saisissante où la représentation du pouvoir expose sa propre duplicité, interrogeant la frontière entre la vérité historique et ses simulacres.
J'ai tant de choses à te dire, / Ou plutôt, une seule, mais vaste comme la mer…
Cette confidence de Mimi dans La Bohème, que Walid reçoit comme une promesse au début du roman, devient la métaphore de l’œuvre entière : un récit qui, sous l’apparence d’une histoire d’amour, contient l’océan d’un siècle de fracas et de silences.
Irina, un opéra russe est une fresque puissante sur
la rémanence du passé et la manière dont les vivants portent, souvent sans le
savoir, les fantômes de l’Histoire. En liant le destin d’une cantatrice de
Leningrad à la mémoire de la famine kazakhe et à l’exil d’un intellectuel
algérien, Anouar Benmalek tisse des correspondances inattendues entre les
géographies et les époques. Le roman laisse une trace profonde par sa capacité
à incarner dans des destins singuliers les grandes tragédies collectives, et
par sa conviction que l’art, même s’il ne sauve de rien, demeure le lieu où la
dignité humaine peut encore se chanter. C’est une œuvre dont la musique, à la
fois déchirante et lumineuse, continue de résonner bien après que le rideau est
tombé.

